« Non, non. Attends, toi. Laisse-moi finir. Ce que je voudrais te dire, c’est que, l’amour, tu comprendras un jour que c’est surtout une affaire entre soi et soi. Ce n’est pas tant une personne qu’on aime que l’idée même de l’amour. Tu connais la phrase de Lacan : Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. Pourquoi je te dis ça ? Juste parce que la peine que tu peux ressentir maintenant, une fois le chagrin passé, dans quelque temps, eh bien tu prendras soudain conscience que tu lui auras donnée beaucoup trop de place. Je ne cherche pas à minimiser ton chagrin, là, non. Vis-le, ton chagrin, vis-le à fond. Mais, si par moments tu es trop malheureuse, si tu sens qu’il t’étouffe, ce chagrin, alors essaye de te dire que la personne que tu pleures, eh bien elle valait peut-être pas tant le coup que ça. Que l’amour, c’est dans ta tête que tu l’as construit toute seule. Que l’autre n’était qu’une projection de tes propres désirs. Tu connais aussi ce mot, tellement galvaudé, de Swann à propos d’Odette, hein : « Dire que j’ai gâché des années de ma vie, que j’ai voulu mourir, que j’ai eu mon plus grand amour, pour une femme qui ne me plaisait pas, qui n’était pas mon genre ! » Voilà. Tout ce que je voulais te dire, c’était ça : qu’on croit d’abord que c’est la fin du monde, puis qu’on finit toujours par s’en remettre. Essaye de te loger ça dans un coin de la tête, même si je sais bien que ça ne sert pas à grand-chose dans ces cas-là. » (Nicolas Fargues, Le roman de l’été)
J’adore!
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